L'épilogue de cette histoire aura lieu demain à compter de 16H30,
selon le Conseil Constitutionnel.
Darkent a écrit :
D'ailleurs, Macron va lui-même demander au Conseil Constitutionnel de réviser le texte, ce qui va probablement dégager le truc concernant les APL, car la constitution garantit l'égalité entre les résidants sur ce genre d'aspects.
Darkent, ne prends pas personnellement ce que je vais écrire.
Ce que j'ai souligné dans ton message est plus un vœu journalistique qu'une véritable analyse juridique.
En France, le principe d'égalité n'est pas absolu. Il ne garantit pas une stricte égalité entre les citoyens ou les résidants. Si tel était le cas, les différenciations tarifaires fondées sur l'âge (cartes de transport) ou sur les revenus (tickets de cantine, places en crèche, etc ...) seraient illégales. Au surplus, les prestations sociales seraient versées indifféremment à tous les administrés.
En réalité, cela fait plus de 30 ans que le Conseil Constitutionnel estime que le principe d'égalité n'interdit pas de traiter différemment des situations différentes, dès lors que le traitement différencié est fondé sur un motif d'intérêt général.
Sur le plan juridique et administratif, qu'y a-t-il de plus différent qu'un citoyen français et un ressortissant étranger ? Pas grand chose.
S'agissant des motifs d'intérêt général, ils sont nombreux. Pour reprendre ton exemple, le Conseil Constitutionnel pourrait valider les mesures de la loi immigration limitant l'accès des prestations sociales aux étrangers en estimant que cette limitation est justifiée par la sauvegarde de l'ordre public, la lutte contre la fraude fiscale ou l'équilibre financier de la sécurité sociale. Les trois exemples que je viens de donner ne sont pas anodins puisqu'il s'agit d'
objectifs de valeur constitutionnelle, c'est-à-dire des objectifs que le Législateur doit respecter, sous peine de voir sa loi être censurée par le Conseil Constitutionnel.
Ceci étant précisé, il faut bien comprendre une chose. La décision que rendra le Conseil Constitutionnel indiquera moins la conformité ou non de la loi immigration à la Constitution, que la coloration politique dudit Conseil. Il est impossible de rendre une décision juridique neutre politiquement quand les 9 membres du Conseil Constitutionnels sont nommés, par tiers, par le Président de la République, le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat. Chacun place ses pions et souvent, le Président de la République sortant place des adversaires du Président entrant pour lui mettre des bâtons dans les roues. Pour mémoire, l'actuel Président du Conseil Constitutionnel, Laurent FABIUS, a été nommé par ... François HOLLANDE et retenez que le vote du Président du Conseil compte double.
Enfin, il faut bien comprendre une seconde chose. Le bloc de constitutionnalité et la jurisprudence du Conseil Constitutionnel contiennent autant d'arguments juridiques permettant de valider loi immigration portée par Gérald DARMANIN que d'arguments permettant de l'invalider.
Par exemple, s'agissant des mesure facilitant les expulsions du territoire, le Conseil Constitutionnel pourrait les censurer en se fondant sur le principe de fraternité tout comme il pourrait les valider en se fondant sur l'objectif de lutte contre l'immigration irrégulière qui participe, selon lui, à la sauvegarde de l'ordre public, qui est un objectif de valeur constitutionnelle comme indiqué précédemment.
Donc pour le dire prosaïquement, le Conseil Constitutionnel validera majoritairement la loi immigration s'il est plutôt de droite mais la censurera majoritairement s'il est plutôt de gauche. Cependant, nous ne sommes pas à l'abri d'un « en même temps » ...
Raison pour laquelle je le redis, la décision que rendra demain le Conseil Constitutionnel révèlera en partie le camp politique vers lequel il penche. En cas de recomposition du Conseil Constitutionnel et de changement du Président de la République, le nouveau Gouvernement pourrait déposer sereinement un projet de loi plus ferme ou plus souple.
Bobelou a écrit :
Rendez-vous dans quelques années pour continuer de dépouiller le droit du travail pour fournir des travailleurs dociles aux secteurs en manque.
Bien que cela soit un autre sujet, c'est une remarque assez pertinente.
En mettant de côté les questions de retraite et de chômage, les droits des travailleurs ont considérablement été rabotés depuis 2016, notamment en matière de respect de la durée du temps de travail, de formation, de contestation du licenciement, d'indemnisation pour rupture du contrat de travail, de rupture conventionnelle, de prévention des risques, etc ...
Les syndicats ont été incapables de comprendre les enjeux, de sensibiliser les salariés sur ces questions et de les mobiliser pour manifester. Leur responsabilité est énorme.
Mis bout à bout, la contrainte de travailler deux ans de plus représente peu de choses comparé à l'accumulation des régressions des droits des travailleurs.